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30 juillet 2010 5 30 /07 /juillet /2010 13:46

Miyazawa Kenji

Kenji Miyazawa (1896-1933), poète et auteur de littérature pour enfants fut un homme ouvert sur son temps et curieux de tout, notamment de l'espéranto. Son oeuvre ne rencontrera la reconnaissance du public qu'après sa disparition (1). En France, il est principalement connu pour ses romans (dont le "Train de nuit dans la voie lactée").

 

Il m'apparaissait dommage de ne pas vous présenter son poème le plus connu "Ame ni mo makezu" (lequel ne bénéficie pas de traduction francophone, même sur wikipédia à l'heure actuelle ) avec une traduction personnelle.

 

De fait la traduction en poésie peut emprunter de nombreux chemins - il n'existe ainsi pas une seule version possible d'un texte Dans le cas de poésie libre japonaise du début du vingtième siècle (années 20-30), il n'est pas certain que les auteurs utilisaient la notion d'espace comme en occident (saut de ligne, strophes...) et jouaient avec. Le texte japonais forme un corps. Les pauses (ou espaces) sont implicites et à contenues à l'intérieur de l'oeuvre.

 

Kenji Miyazawa utilisait des termes modernes pour l'époque, jouait avec les caractères par l'utilisation intégrale de katakanas dans le poème moderne semble-t-il (les kanjis auraient été introduits ensuite pour faciliter la lecture du texte).

 

La version japonaise et sa transcription sont tirées de aozora et wikipédia en anglais.

 

雨ニモマケズ
風ニモマケズ
雪ニモ夏ノ暑サニモマケヌ
丈夫ナカラダヲモチ
慾ハナク
決シテ瞋ラズ
イツモシヅカニワラッテヰル
一日ニ玄米四合ト
味噌ト少シノ野菜ヲタベ
アラユルコトヲ
ジブンヲカンジョウニ入レズニ
ヨクミキキシワカリ
ソシテワスレズ
野原ノ松ノ林ノ蔭ノ
小サナ萓ブキノ小屋ニヰテ
東ニ病気ノコドモアレバ
行ッテ看病シテヤリ
西ニツカレタ母アレバ
行ッテソノ稲ノ朿ヲ負ヒ
南ニ死ニサウナ人アレバ
行ッテコハガラナクテモイヽトイヒ
北ニケンクヮヤソショウガアレバ
ツマラナイカラヤメロトイヒ
ヒドリノトキハナミダヲナガシ
サムサノナツハオロオロアルキ
ミンナニデクノボートヨバレ
ホメラレモセズ
クニモサレズ
サウイフモノニ
ワタシハナリタイ

ame ni mo makezu
kaze ni mo makezu
yuki ni mo natsu no atsusa ni mo makenu
jōbu na karada wo mochi
yoku wa naku
kesshite ikarazu
itsu mo shizuka ni waratte iru
ichi nichi ni genmai yon gō to
miso to sukoshi no yasai wo tabe
arayuru koto wo
jibun wo kanjō ni irezu ni
yoku mikiki shi wakari
soshite wasurezu
nohara no matsu no hayashi no kage no
chiisa na kayabuki no koya ni ite
higashi ni byōki no kodomo areba
itte kanbyō shite yari
nishi ni tsukareta haha areba
itte sono ine no taba wo oi
minami ni shinisō na hito areba
itte kowagaranakute mo ii to ii
kita ni kenka ya soshō ga areba
tsumaranai kara yamero to ii
hideri no toki wa namida wo nagashi
samusa no natsu wa oro-oro aruki
minna ni deku-no-bō to yobare
homerare mo sezu
ku ni mo sarezu
sō iu mono ni
watashi wa naritai

 

*****

 

Ne pas céder face à la pluie

Ne pas céder face au vent

Ne pas céder non plus face à la neige ou à la chaleur de l’été

Avec un corps solide

Sans avidité

Sans perdre son tempérament

Cultivant une joie tranquille

Chaque jour quatre bols de riz complet

Du miso et un peu de légumes à manger

Dans toutes les choses

Sans y mettre ses émotions

Voir, écouter et comprendre

Et sans oublier

Dans l’ombre des bois de pin des champs

Vivre dans une cabane au toit de chaume

S’il y a un enfant malade à l’Est

Y aller et le veiller

S’il y a une mère fatiguée à l’Ouest

Y aller et porter sa gerbe de riz

S’il y a quelqu’un proche de la mort au Sud

Y aller et lui dire qu’il n’y a pas besoin d’être effrayé

S’il y a une dispute ou un litige au Nord

Leur dire de ne pas perdre leur temps en actes inutile

En cas de sécheresse, verser ses larmes de sympathie

Lors d’un été froid, errer bouleversé

Appelé un bon à rien par tout le monde

Sans être complimenté

Ni rendu responsable

Une telle personne

Je voudrais devenir

 

  *****

 

L'insertion d'écarts de lignes serait déjà une interprétation du poème, mais voici ce que cela peut donner :

 

Ne pas céder face à la pluie

Ne pas céder face au vent

Ne pas céder non plus face à la neige ou à la chaleur de l’été

 

Avec un corps solide

Sans avidité

Sans perdre son tempérament

Cultivant une joie tranquille

 

Chaque jour quatre bols de riz complet

Du miso et un peu de légumes à manger

 

Dans toutes les choses

Sans y mettre ses émotions

Voir, écouter et comprendre

Et sans oublier

 

Dans l’ombre des bois de pin des champs

Vivre dans une cabane au toit de chaume

 

S’il y a un enfant malade à l’Est

Y aller et le veiller

S’il y a une mère fatiguée à l’Ouest

Y aller et porter sa gerbe de riz

S’il y a quelqu’un proche de la mort au Sud

Y aller et lui dire qu’il n’y a pas besoin d’être effrayé

S’il y a une dispute ou un litige au Nord

Leur dire de ne pas perdre leur temps en actes inutile

 

En cas de sécheresse, verser ses larmes de sympathie

Lors d’un été froid, errer bouleversé

 

Appelé un bon à rien par tout le monde

Sans être complimenté

Ni rendu responsable

 

Une telle personne

Je voudrais devenir

 

D'autres recompositions sont possibles, mais qu'importe, relisons le texte pour s'imprégner de sa poésie...

 

 

Quelques liens :

- Shunkin: le site de référence sur la littérature japonaise ;

- les oeuvres de l'auteur disponibles sur aozora en japonais (tombées dans le domaine public);

- un article du blog chichinpuipui sur les fruits du Gingko, un ouvrage de l'auteur.

 

(1) son oeuvre fut en grande partie publiée à titre posthume. En matière de poésie, seuls deux de ses textes furent ainsi publiés de son vivant. Le présent "ame ni mo makezu" fut retrouvé dans un carnet d'une de ses malles.

 

Ma/update : 03/08/2010; 17/01/2011

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Published by chris - dans Poésie - 詩